La fête de la Mi-automne

La fête de la Mi-automne au quinzième jour du huitième mois du calendrier agricole, avec la fête du Printemps, la fête de la pure clarté Qingming et la fête des bateaux Dragons, est l’une des plus importantes fêtes traditionnelles chinoises.

 

Elle a été dénommée d’après sa position calendaire, située exactement à la moitié des trois périodes automnales. Correspondant à la saison des moissons, la fête de la Mi-automne célèbre l’abondance des récoltes.

 

Depuis l’Antiquité, l’image du clair de lune est empreinte d’une signification particulière dans la culture chinoise, hautement considérée par les lettrés, elle est source de plaisir parmi le peuple. La nuit de la Mi-automne, la lune éclatante d’une blancheur immaculée est suspendue en la vacuité, pleine lune la plus ronde et la plus brillante de l’année. Moment idéal pour contempler la lune, la fête de la Mi-automne est aussi appelée fête de la lune. En le ciel d’une pureté de jade, la lune ronde telle une assiette symbolise la réunion harmonieuse.

 

Chaque année le soir de la Mi-automne, les familles chinoises savourent des gâteaux de lune en contemplant l’astre plein. La famille est au complet, la joie à son comble. Dans la civilisation chinoise, l’un des sentiments les plus naturels et authentiques est de se conformer année après année aux fêtes traditionnelles transmises de génération en génération.

La fête de la Mi-automne au cours de l’histoire

 

L’expression « mi-automne » apparaît pour la première fois dans le chapitre Yaodian du Livre des Shang, le plus ancien document historique chinois. Sous la royauté Zhou (1046-256 avant J.C.), il est de coutume de tenir une grande cérémonie pour accueillir l’automne et célébrer le clair de lune. Sous la dynastie Han (202 avant J.C.--220 ap. J.C.), l’empereur conduit la noblesse en campagne de chasse et le gibier pris constitue l’offrande sacrificielle du culte de la Mi-automne. Sous les Tang (618-907), de même que sous les Han, la célébration de la fête de la Mi-automne demeure la prérogative de la noblesse. C’est sous les Song (960-1279) que la Mi-automne s’étend jusqu’au peuple et devient l’une des plus importantes fêtes de la tradition.

 

Wu Gang abat le cannelier

 

On raconte que sur la lune il y a un arbre de mille cinq cents mètres de haut. Sous la dynastie Han, un dénommé Wu Gang se passionnait pour les voies de l’immortalité mais ne se concentrait pas dans l’étude. Il déclencha le courroux de l’Empereur céleste qui le retint prisonnier dans le Palais lunaire où il le somma de couper un cannelier : « Si tu abats cet arbre, tu pourras accéder aux techniques d’immortalité. »

 

Wu Gang entrepris alors la tâche, mais après chaque coup de hache qu’il donnait, la fente en l’arbre se résorbait immédiatement. Jour après jour, son souhait de voir l’arbre abattu ne pouvait se réaliser ; il demeura à longueur d’année sur la lune coupant le cannelier sans jamais pouvoir l’abattre.

 

C’est ainsi que les générations postérieures purent apercevoir l’image de Wu Gang sur la lune donner inlassablement des coups de hache sur le cannelier.

 

Connotation culturelle de la fête de la Mi-automne

 

À la mi-automne, la lune pleine luit d’un éclat d’une blancheur immaculée. Symbole de plénitude dans les temps anciens, l’astre au quinzième jour du huitième mois lunaire, consacré par la fête de la Mi-automne ou fête de la réunion, marque le précieux moment des retrouvailles en famille.

 

Ainsi « lune pleine et lune incomplète » évoquent les « peines et joies de la séparation et des retrouvailles », et l’hôte voyageur en pays étranger confie la nostalgie du pays natal au clair de lune mi-automnal. La stance « Lune claire s’élève par-delà les mers ; à l’horizon cet instant en commun » évoque le for intérieur du voyageur qui, le cœur attaché au pays natal, partage avec ses compatriotes à travers la contemplation de l’astre plein l’aspiration aux retrouvailles.

 

Mythes et légendes rattachés à la fête de la Mi-automne

 

De même qu’à certaines fêtes occidentales ont été rattachés divers mythes et légendes, la tradition taoïste a paré de couleurs fabuleuses la fête de la Mi-automne – citons la célèbre histoire de Chang E qui s’enfuit sur la lune.

 

Chang E se vit confier par son époux, l’archer Hou Yi, l’élixir d’immortalité qu’il avait obtenu par la grâce de Xi Wangmu, reine mère de l’Ouest. En proie au désir de devenir immortelle, Chang E profita de l’inattention de Hou Yi pour ingurgiter à l’insu de ce dernier l’élixir puis s’envola vers le Palais lunaire.

 

Ce jour-là était précisément le quinzième du huitième mois, lune pleine et lumineuse. Chang E, honteuse de son acte, stoppa sa course sur la face de la lune la plus proche de la Terre pour loger indéfiniment au Palais de la vaste froideur.

 

Houyi, de retour, tomba dans une profonde affliction. Ainsi chaque année, au quinzième du huitième mois, il dispose un banquet face à la lune à l’occasion duquel il retrouve Chang E.

 

Le lapin de Jade

 

Chang E demeurée esseulée dans le Palais lunaire, il fut intégré au conte à partir de la dynastie Han un lapin à la blancheur de jade qui devint son animal de compagnie.

 

Sous les dynasties Ming et Qing, se voyant attribuer la capacité de concocter des préparations médicinales, le lapin de Jade pile sur la lune du matin au soir des herbes dont la vertu donne accès à l’immortalité.

 

Par suite le folklore lui rend hommage de manière spécifique ; ainsi à Pékin et à Tianjin il est considéré avec révérence jusqu’à nos jours comme lapin Sage.

La sonde spatiale Yutu « lapin de Jade »

 

Depuis l’Antiquité, les humains n’ont cessé de se passionner pour la lune. Le 16 décembre 2013, la Chine a lancé la sonde spatiale Chang E III et avec elle le véhicule lunaire Yutu dont l’énergie est fournie par panneaux solaires et qui effectue des explorations à la surface de la lune d’où il renvoie simultanément vers la Terre des photographies en temps réel.

 

Cet adorable « lapin de Jade » accomplissant sa mission d’exploration a transporté jusqu'à la surface de l'astre l'imaginaire idéalisé rattaché à la lune depuis des millénaires.

 

Contemplation de la lune à la mi-automne

 

La lune de la mi-automne est d’une clarté exceptionnelle. À partir de la dynastie Tang, la poésie contemplative aux richesses raffinées sur la thématique de la lune est en vogue. Lettrés et hommes de bien réunis savourent de l’alcool célébrant la lune et composent des poèmes sur les aspects aux saveurs multiples de l’astre magnifique. Les gens du commun se retrouvent en famille, entre amis dans une atmosphère chaleureuse sur les hauteurs des pavillons où ils admirent la pleine blancheur immaculée.

 

Parmi les dix grands sites sacrés de contemplation de la lune, Santan Yinyue “Trois étangs empreintes de la lune” du lac de l’Ouest à Hangzhou est le plus célèbre. Au centre du lac les pagodes de pierre se reflètent dans l’eau, sous les pagodes apparaît un étang profond où se diffuse le clair de lune. La lune dans le ciel, la lune dans l’eau, la lune dans les pagodes se font mutuellement écho et composent avec la vaste étendue de la surface lacustre un tableau d’une harmonie parfaite tel un paysage d’immortels en ce monde.

 

Gâteaux de lune

 

Les fêtes chinoises et occidentales sont généralement accompagnées de plats traditionnels, ainsi les Chinois à l’occasion de la fête du Printemps mangent des raviolis, pour la fête des Lanternes ils mangent des boulettes de farine de riz, à la fête des bateaux Dragons, du riz glutineux enveloppé d’une feuille de bambou, à la fête de la Mi-automne des gâteaux de Lune, dont l’aspect externe sphérique, tendre et rempli évoque, à l’instar de la lune claire, la perfection de la plénitude.

 

À partir des Tang les gâteaux de lune prisés pour leur goût exquis se diversifient. Leur surface est souvent marquée de dictons et de motifs relatifs au clair de lune préalablement tracés sur un moule, la forme des pâtes et la composition des farces s’enrichissent. Les procédés de fabrication varient selon les endroits et les saveurs : sucré, salé, sucré-salé, épicé, les farces incluent fleurs d’osmanthe, noix, haricots, sucre candi, fruit de ginkgo, viande, sésame noir, jambon, chair de crabe. Les gâteaux de lune diffèrent avec les endroits : à la façon du Guangdong, du Jiangsu, de Pékin, de Canton, du Anhui, du Yunnan ou de Chaozhou. L’illustre poète Su Dongpo composait : « Un petit gâteau, c’est croquer la lune, croustillant moelleux et sirupeux au centre ».

 
La fête de la Mi-automne dans la poésie chinoise

 

Le « clair de lune » a été vénéré par les poètes chinois depuis l’Antiquité. La littérature classique regorge de poèmes sur le thème de la saison mi-automnale à laquelle l’auteur confie sa nostalgie du pays natal, ainsi ce vers transmis depuis des siècles : « la lune claire s’élève au-delà des mers ; à l’horizon cet instant en commun ».

 

La nuit de la mi-automne, les Chinois séparés par les quatre mers à travers le temps et par-delà l’espace contemplent la lune claire suspendue au lointain dans la vacuité. « La lune est plus claire dans le pays natal», la rondeur pleine du clair de lune qui brille pour l’éternité illustre la ronde plénitude du cœur des hommes. 

 

Comme l’exprimait magistralement le grand poète Su Shi dans Prélude à la mélodie de l’eau : « Les hommes connaissent tristesse et joie de la séparation et des retrouvailles ; la lune, l’obscurité et la clarté de la plénitude et de l’incomplétude ; il en est ainsi depuis toujours. Mais souhaitons la longévité, pour à mille lieues partager les grâces de l’astre blanc. »

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